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L'Atelier de Ramettes
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9 juillet 2018

Soixante jours

Sarah Marty

Editions Denoël,  mai 2018, 279 p., 20 €

Mes lectures Denoël

B26875

4e de couv. :

«C’est l’histoire vraie d’un homme qui a marché des nuits et des jours, sans relâche. L’histoire d’un homme venu un jour reconstruire le mur d’enceinte de ma maison soufflé par la tempête. Quelque chose de solide émanait de lui, une force implacable.
Pourtant, face à ce mur écroulé qui offrait comme horizon le jardin aux arbres séculaires des voisins, l’homme s’est mis à trembler. Après un long silence, il m’a avoué avoir peur des forêts. Cette confidence m’a étonnée, le contraste entre cet homme costaud et cette peur enfantine était saisissant. Qui était-il vraiment?
Peu à peu, l’homme s’est confié, et une fois sa vie exhumée je lui ai fait une promesse, écrire son histoire. Celle de ces Kurdes qui, un matin de novembre, ont fui ensemble la Turquie. Ce livre est double, il raconte l’histoire de ce groupe de personnes qui m’a tant bouleversée mais il nous raconte aussi. En chacune de ces personnes se cache une part de nous-mêmes. Chacun porte en soi le ciel et l’enfer…»

Mon Billet :

Un roman poignant qui nous tient en haleine car on ne sait ni qui, ni quand, ni comment la « Grande Dame » viendra faucher une vie.

Nous allons suivre un groupe de migrants Kurdes qui côtoyaient la mort  dans leur pays mais qui là vont connaître les affres de douleurs encore plus inhumaines.

Même si c’est tiré d’une histoire vraie, nous sommes dans un roman et la distanciation que procure la littérature permet au lecteur comme moi de prendre du recul. Si on avait eu un témoignage « direct » je n’aurais pas pu le lire. Je me suis beaucoup accroché à l’aspect écriture.

En effet il y a une véritable construction littéraire. A chaque étape l’horreur prend des aspects et des proportions différents. Il y a des détails qui permettent de se douter des réactions aux moments clés. Chaque candidat est différent, et à une histoire personnelle différente. Un bagage plus lourd à porter que leur sac à dos. J’ai beaucoup aimé les chapitres qui nous permettent d’avoir quelques informations de base sur certains personnages avant qu’ils ne deviennent un groupe.

Ce qui ressort de cette histoire, c’est que l’instinct de survie est plus fort que tout. La barrière entre l’humain et l’animal est fragile. La survie dépendant de la solidarité, soutenir l’autre c’est  soutenir soi. On est rien sans l’autre.

Ce que j’ai aimé dans cette terrible histoire, c’est que plus on essai de déshumaniser les clandestins, plus ils se soudent entre eux. Ils ont tacitement décidé de ne laisser personne sur le bord du chemin pour ne pas devenir pire que leurs passeurs.

Ce qui a retenu mon attention tout au long de ce roman c’est « le regard ». Ne pas regarder dans les yeux son bourreau pour ne pas le provoquer, ne pas regarder les victimes pour ne pas leur donner prise sur vous, ne pas leur donner un statut d’humain.

Le regard qui peut trahir son état d’âme, ses émotions, son intimité. Ne pas attiser la convoitise. Ne pas montrer sa volonté. Ne pas supplier. Ne pas abdiquer.

Ce roman met en avant l’importance de l’oralité et de la mémoire. Chacun se confie à son rythme. Certains secrets prennent plus de temps à voir le jour. Le lecteur est dans l’attente.

Il y a un suspens épouvantable dans ce roman qui garde le lecteur sur le qui-vive.

Dans la structure du/des récits on retrouve l’image de la boucle qui se referme. La structure est très travaillée pour ne pas se laisser déborder par les émotions. Ce n’est pas un enchaînement de situations dramatiques.

Pierre après pierre le mur du jardin montera et dans chaque pierre c’est de chaque souvenir qui laissera son empreinte.

Les personnages sont forts et fragiles en même temps. Ce roman montre que ce sont des gens ordinaires que la vie à rendu extraordinaires. Ils ne voulaient battre aucun records, ils ne voulaient pas aller au bout de l’effort, non ils voulaient juste vivre. Cela ce passe encore aujourd’hui et les atrocités ici racontées ne sont qu’une infime partie de celles que les hommes sont capables d’infligés autour d’eux.

Les passeurs, le réseau mafieux, là aussi on a essayé de nous montrer qu’une facette d’eux. Par instant on essai de repérer des éléments qui pourraient nous faire dire qu’eux aussi font parti d’un réseau, qu’ils n’ont pas le choix, mais non aucune sympathie n’est possible. Je ne vous parlerais pas de la place de l’argent. Pour certain la valeur humaine ne correspond qu’à l’argent qu’il peut produire, pour d’autre la valeur humaine est bien différente.

Comme dit Bernard Pivot sur le bandeau du livre : « A lire et méditer ». Car c’est actuel !, c’est tous les jours même si les journaux n’en parlent pas toujours. Lire ce roman alors qu’il y avait l’affaire de l’Aquarius c’était juste insupportable.

Je vous laisse découvrir cette marche au bout de l’enfer, et ce qu’ils vont découvrir. La marche est un sujet très intéressant dans ce roman. Par exemple : Marcher c’est entre autre rester debout, c’est aussi continuer à avancer coûte que coûte. Marcher c’est aussi avoir un statut « d’Homme », ne pas ramper comme un animal, ne pas être porté comme un bébé.

Il y a des moments tendres et drôles, pour pouvoir continuer à avancer et à vivre ensemble, il faut se créer des bouées de survie, des bulles d’oxygène.

Heureusement qu’il y a un chapitre un peu « surréaliste » vers la  fin pour que le lecteur puisse reprendre son souffle, un peu d’oxygène pour ne pas se noyer.

Je remercie les Éditions Denoël pour leur confiance.

Denoel

 

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